Une femme I


 

   Ce n'est pas la fumée jaunâtre qui s'échappe d'une cheminée lointaine, ce n'est pas le sillon hésitant d'une roue de vélo que la boue a partiellement recouverte, qui ont autorisé cette femme à baguenauder parmi cottages et bourgs bien ordonnés.

 

  Vous la voyez à présent faire un grand écart sur la branche d'un puissant chêne sessile ; ce n'est pas qu'elle s'entraîne à quelque acrobatie périlleuse, ce n'est pas non plus qu'elle ait choisi la position imposée par sa société, c'est que l'envergure qui sépare ses deux pieds, lui semble à l'échelle de l'univers. Cette impression la rassure, l'apaise, l'emmène, et personne ne songe à lui en vouloir.

 

   Et quand un vieux cheval solitaire vient frotter sa croupe contre le tronc du chêne, sans laisser autre chose de son passage qu'une bouse tiède remplie de végétation, elle désigne du doigt l'immuable carcasse d'un engin agricole, le rire aux lèvres, le baume au cœur.  

 

   D'un renflement de poitrine elle brasse tant d'années d'échecs, mais tant de courage à la fois, qu'elle pourra rentrer dans la ville sans se soucier de sa pitance, ni du faîtage qui lui garantira un sommeil de qualité. Vous la verrez conquérante, céleste et chaste dans son phrasé, dans son regard, sa gestuelle, et vous la prendrez sous votre aile. Vous la baptiserez pour l'éternité. 



Une femme II =>


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