Aube se lève sans mots dire
Aube se lève sans mots dire
Aube se lève sans maudire,
L'heure est à la rédemption.
Elles ont fui, les passions,
Haleines d'étoiles naines
Qui gonflent la voile pleine
De silence et d'oubli.
Entre deux phalanges mortes
Jamais vent ne faiblit ;
Quand j'écarte l'une d'elles,
Ce sont mes nuits que j'emporte,
Et s'enfuient à tire d'ailes
Mes grumeaux de pleurs.
Certains flottent flottent flottent,
D'autres s'accrochent aux brindilles
Des arbres de passage.
Gouttes de couleur,
Virgules des outrages,
Larves molles de cochenilles.
Vous les voyez qui grelottent,
Pendues aux arbres de bataille
Et mes amours, fétus de paille,
Flambent encor, becs de volailles
Restés béants aux cris de l'âme,
Que le monde veut étouffer
Dans un pieux autodafé.
Mais qu'un seul mot cruel entame
Une partie de ma raison,
Et je récrirai tout mon drame
En une funeste oraison.
Elles sont l'œil du tentacule
Qui voit et vire avec le vent.
J'ai soupesé au ciel
Plus d'un empan de litanies
Qu'au bord d'un puits j'accule ;
J'y reviendrai souvent
Vous voir flotter, espoirs bannis,
Et dans la glaire et dans le fiel.
Les mouches suivent l'âne,
Et l'âne cloche du sabot.
L'élégante se fane,
Les soupirants ne sont pas beaux.
Persistantes, les ténèbres,
Sur la paume de ma main.
Je décompte les vertèbres
De mon dos rouge carmin.
Barricade, barricade,
Je te regarde de travers ;
Jaillira de mon arcade
L'encre grasse de mes vers.
Et si l'âne passe,
Et si l'âne passe,
Et si le sabot dérange,
Si beauté s'efface,
Si beauté s'efface,
Si de l'herbe l'âne mange,
Alors aube se lève encor.
Alors aube se lève encor.
Commentaires
Enregistrer un commentaire